« Lettre d’une libre-exaministe au fils de l’Homme », Bruxelles, Éditions Ercée, 2010
Dans cet ouvrage édité pour les 175 ans de l’ULB, trente-cinq auteurs qui l’ont fréquentée offrent une part de leur imaginaire.
ULB une fiction vivante, avec des textes de Gérard Adam, Frank Andriat, Anatole Atlas, Isabelle Bary, Alain Berenboom, Véronique Bergen, Martine Cadière, Michel Claise, Jacques De Decker, André Doms, Alain Eraly, Nathalie Gassel, Christopher Gérard, Thomas Gunzig, Evelyne Guzy, Corrine Hoex, Claude Javeau, Serge Kribus, Françoise Lalande, Stéphane Lambert, Pierre Mertens, Adolphe Nysenholc, Marian Pankawski, Jean-Claude Pirotte, Anne Richter, Philippe Roberts-Jones, Marc Rombaut, Marianne Sluszny, Daniel Soil, Jacques Sojcher, Alain van Crugten, Jean-Pierre Verheggen, Pascal Vrebos, Yves Wellens, Sandrine Willems.
Le début de la « Lettre d’une libre-exaministe au fils de l’homme »
Cher Jésus,
Tu seras sans doute étonné de recevoir cette lettre d’une fille de l’ULB… Qu’attendre en effet de ce bastion du libre-examen, d’où tu entends claironner « A bas la calotte » depuis 175 ans ? De ton point de vue, pas grand-chose, j’en conviens. Pourtant, tu continues de hanter, comme en creux, les couloirs de ma vénérable Alma Mater. Tant de fidélité de ta part méritait bien un petit hommage de la mienne… Malgré nos différends, j’ai décidé de te pardonner.
Nous avons été très fâchés toi et moi, c’est vrai, et pendant longtemps. Je l’avoue, j’ai sans doute été injuste. Le fils est-il coupable du crime du père ? Et le père, de celui du fils ? Alors, de quel droit t’ai-je reproché les infamies commises en ton nom ? Oublions l’Inquisition et tout le reste : aujourd’hui j’ai décidé de te parler comme à mon frère en humanité…
Car de toutes ces années à l’ULB, qu’ai-je gardé ? Un certain questionnement, je crois. Une volonté de ne jamais clôturer le débat, de me poser les questions autrement. Une propension à remettre en cause les dogmes, à renverser les préjugés. Un espoir secret de changer la face du monde. Bref, un peu de toi, finalement… Avant de te retourner une fois de plus dans ta tombe, je t’invite donc à lire ma petite bafouille. Mais, s’il te plait, n’en parle ni à Marie ni à Madeleine.
En vérité je te le dis, Jésus, nous sommes issus de la même matrice, toi et moi : celle du Grand Tout. En nous, s’épanouissent les germes plantés par nos parents et nos grands-parents (d’une façon peut-être un peu particulière dans ton cas, j’en conviens). Que je le veuille ou non, tu es là, comme une parcelle de l’univers enfoui en moi, malgré moi. Mon « Je » est un « Nous » qui te doit beaucoup. Et, comme toi, je ne peux grandir et m’élever qu’en acceptant la filiation dont je suis issue.